San Agustín : dans les montagnes, les ruines et les dilemmes
Fini la danse et la chaleur de Cali, direction tourisme à San Agustín et avec la petite ville perchée entre les cordillères occidentale et orientale dans la vallée du fleuve Magdalena, la plus grande nécropole du monde. Oui, du monde, vieille de 4000 ans, où les caciques des ethnies qui habitaient les lieux étaient enterrés.

Avec Gwenn, on décide de louer une cabane près de la Chaquira. Pas la chanteuse mais le site archéologique qui, selon la légende (non sourcée, va falloir me croire sur parole) servait de portail aux chamans de l’époque pour rentrer en contact avec les dieux.
En négociant par message avec Mario, notre hôte, je lui propose de payer la moitié du prix affiché pour une nuit et de lui filer un coup de main pour le reste, à hauteur d'un nombre d'heures par jour. Il accepte. Arrivés sur place, je lui demande ce qu'il veut qu'on fasse, il me répond qu'il n'y a rien à faire. Résultat : une cabane solitaire éloignée de la ville de San Agustín, le tout au prix d'une nuit en dortoir chacun.
Le parc archéologique, un témoignage de la culture précolombienne.

Le Parc Archéologique de San Agustín ne représente qu'une portion de la nécropole gigantesque que constitue le Parque Arqueológico Nacional de Tierradentro. Et pourtant, il faut plusieurs heures pour le visiter complètement.
Les statues présentent toutes des particularités qui les identifient et qui renvoient à un genre, un statut social, une charge. Les chamans, par exemple, ont des dents pointues. D'autres ont des traits mêlant caractéristiques humaines et animales, d'autres des armes en main pour figurer leur charge de soldats, souvent placés dans les compositions mégalithiques funéraires pour figurer la protection des inhumés.
Ce qui m'a impressionné, en dehors de la taille de ces statues faites en pierres volcaniques (la plus grande se trouvant dans le Parque Alto de los Ídolos au nord de la ville de San Agustín et mesure 7 mètres de haut), c'est le soin apporté à la taille de la pierre.
De gauche à droite : un chaman, reconnaissable à ses dents et à sa "bolsa de poder", sacoche contenant tous types de médecines. Le dieu "arc-en-ciel", tel que l'ont surnommé les élèves d'une école locale, et la déité aigle, serrant dans son bec un serpent, symbole de mimétisme et d'intelligence.
Également, la céramique, qu'elle soit funéraire ou d'utilisation quotidienne, présentait, dans le musée du Parc Archéologique de San Agustín, souvent une finesse de détails éblouissante, et parfois des traits anthropomorphiques amusants.

La ville de San Agustín et le dilemme des villes touristiques.
La ville de San Agustín est prise entre deux tendances : celle d'une ville à la forte culture, où les pratiques ancestrales, la culture colombienne, la culture de la coca (que certaines boutiques utilisent pour préparer un thé traditionnel de coca) et un mode de vie plus simple perdurent ; et celle de l'augmentation permanente du tourisme, source de revenus importants pour la ville et ses habitants mais dénaturant peu à peu cette essence que les touristes recherchent.
C'est la thématique récurrente, à l’œuvre dans les pays dont les ressources naturelles et patrimoniales attirent un public dont le volume finit par dénaturer l'endroit et la particularité attrayante qui en faisait un lieu touristique.
L'exemple parfait de cette dynamique est sans doute la Thaïlande, notamment le triste et fameux exemple de la Maya Bay dans les îles Phi-Phi, qui, a la fin des années 90 a accueilli le tournage du film "La Plage" et dont l'afflux touristique, provoqué par le succès du film, a failli engendrer une catastrophe écologique. Le site, grâce à la prise de conscience des populations locales et des autorités thaïlandaises, a depuis repris des couleurs.
La ville de San Agustín n'en est évidemment pas là mais l'afflux touristique qui augmente avec les années a des conséquences, dont certaines ont un impact très concret sur la préservation des sites archéologiques. C'est le cas par exemple des des pillages de tombes par les "guaqueros". La zone de San Agustín, regorgeant de trésors inconnus et à découvrir, certains se lancent dans le pillage pour proposer aux touristes des pièces uniques.
Café ou coca ? 🤔
En me promenant dans la ville de San Agustín, j'y ai rencontré un homme et son fils qui m'ont invité à boire une bière. Après m'avoir présenté des reproductions artisanales de sculptures du parc, ils m'ont également proposé d’acquérir des pièces qu'ils avaient péché dans des tombes alentours.
En discutant un peu plus longtemps avec eux, ils m'ont avoué que beaucoup de touristes étaient friands de ce genre de reliques et que certains venaient de loin pour participer à ces pillages.
À gauche, une sculpture en or venant d'une tombe proche de la ville de San Agustín. À droite, les statuettes reproduisant celles du parc archéologique de San Agustín.
La triste réalité qu'engendre l'afflux touristique dans des sites d'exception ne nous a malgré tout pas empêché de passer un excellent moment dans la ville de San Agustín, ses alentours, son parc et d’apprécier sa tranquillité douce et silencieuse, en témoignent ces photos :
Pour les intéressé.e.s, vous pouvez visiter virtuellement les différents sites archéologiques de San Agustín ici.
Commentez, partagez, faites connaître si vous aimez, pour que mon porte-monnaie s'alourdisse et me permette d’acquérir cette statuette en or et renier tous mes principes parce que c'est quand-même de l'or et l'or c'est beau et ça en jette pour décorer ma future maison près de la Chaquira (j'ai pas encore de maison alors profitez-en pour rajouter un zéro sur le don).
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