Le désert de la Tatacoa, un espace d'une richesse sous-estimée
Arrivée dans le désert de la Tatacoa
Après qu'Alex m'ait déposé à Fortalecillas, à 40 minutes des 330 km² qui constituent le désert de la Tatacoa (qui, je le rappelle, n'est pas un désert mais qu'on appellera désert quand-même parce que c'est plus glamour), je suis pris en stop par un jeune couple qui vient de Neiva, Huila, comme Alex.
Dans une twingo qui tousse à chaque changement de vitesse, ils m'expliquent qu'ils vont manger un "almuerzo" (déjeuner) dans le désert de la Tatacoa pour le visiter ensuite.

Ils me déposent à l'observatoire, principale raison de ma venue dans le désert de la Tatacoa, et m'incitent à la prudence pour ne pas me perdre dans cet immense labyrinthe que constitue la zone aride du désert de la Tatacoa que je m’apprête à visiter. Je pouffe de rire, confiant dans ma capacité de voyageur aguerri à maintenir un cap dans un "désert" où il n'y aurait qu'à prendre un peu de hauteur pour distinguer le restaurant d’où je suis parti et qui vend son eau plus cher que son "refesco", Coca-Cola en tête. Eux ne rigolent pas et réitèrent leur avertissement.
Casquette vissée sur le crane, et lunettes de soleil bon marché, j'entame la randonnée. En bon rêveur, les deux pieds dans la lune 23h par jour, j'ai oublié de prendre de l'eau avec moi. De toute façon, elle coûtait trop chère, me dis-je, avant de continuer.
Je suis complètement seul sur les sentiers, tantôt sec tantôt gorgés d'eau en attente d’être séchée. La seule compagnie, désagréable, à laquelle j'ai droit sont les "chulos", les vautours noirs en français.
Leur manière de tourner autour de moi, d'abord amusante et me ramenant à une nostalgie bienvenue des bons vieux westerns que je regardais chez et avec mon père, finissent par m'agacer, à mesure que le chemin s'allonge et que la nostalgie se retourne contre moi pour me laisser avec la fameuse scène du désert dans le film "Le bon, la brute et le truand".
Tuco, ici, c'est les chulos.
Sans trop me soucier de mon chemin, je continue, confiant, sur les sentiers qui se dessinent, fasciné par le décor, dont les reliefs sont, pour moi, inédits. Des nuances d'Arizona, de Nevada et du nord mexicain se glissent de partout et je me demande combien de paysages contient la Colombie.
Sans grande surprise, je finirais, assez facilement, par retrouver mon chemin en suivant la voix de touristes françaises qui, smoothie à la main, commentaient la qualité de la visite dispensée par le guide local.
Le désert de la Tatacoa : une richesse astronomique, géologique et paléontologique titanesque
Je rentre à l'observatoire du désert de la Tatacoa pour étendre mes affaires encore mouillées de Mocoa, qui sèchent ici en un quart de minute, et je me prépare à la session d'astronomie.
Vers 19h, un homme d'une cinquantaine d’années, bouc grisonnant et veste de pécheur à la mouche, se présente au groupe de touristes que nous formons sur le patio. Il nous dit qu'il est vulgarisateur en astronomie depuis plus de 30 ans et, qu'avec son fils de 17 ans (dont la sagesse et les savoirs m'ont impressionnés), ils ont installé deux télescopes qui nous attendent sur le toit.
On commence avec la Lune, puis Venus et Mars, mais c'est Jupiter, avec ses satellites visibles presque à l’œil nu, qui enchante l'enfant en moi qui se délecte à sortir sans crainte pour poser toutes sortes de questions.

J'apprends ainsi à mieux comprendre comment se comporte un système à deux ou trois soleils ; pourquoi Jupiter est surnommée l’étoile ratée (et comment notre système solaire aurait pu devenir binaire) ; pourquoi Venus est aussi brillante dans le ciel ; etc, etc, etc.

L’inépuisable puits de science qu'est Osvaldo me révèle également une nouvelle qui me stupéfait : il y a quelques jours, dans le désert ici à Tatacoa, un crâne de crocodile Gavial ou Gryposuchus colombianus a été exhumé.


Petite pensée pour ce petit homme en haut à gauche qui se trouve à moins d'un mètre du gavial et qui s’apprête à passer de "prof d'histoire-géo à Angoulême" à "en-cas léger pour croco en diète". Sources : Jurassic Park Fandom et Reddit
Le désert de la Tatacoa, comme me le confie Osvaldo, alors que la session d'astronomie se clairsème, est surtout connu pour ses paysages, beaucoup moins pour son autre richesse : son sous-sol, regorgeant de fossiles en tout genre, dont certains sont visibles au musée paléontologique de Villavieja.
C'est d'ailleurs là-bas que je découvre l'existence, dans un passé où il fallait sûrement être attentif et pas mettre trop souvent ses airpods pour sortir se balader, le spécimen Stupendemys Geographicus, une tortue géante découverte au Venezuela, qui est, à ce jour, la plus grande espèce de tortue d'eau douce découverte.

Le lendemain, je prends une petite barque pour traverser le rio Magdalena, et rejoindre Aipe, où je prendrais la route pour Bogotá.
Sur la route, je rencontrerais, entre autres, Jorge Alberto, qui avait un don étonnant et hilarant, dont je vous laisse apprécier l’étendue :

Hasta luego Tatacoa, ahora Bogotá !
Commentez, partagez, faites connaître si vous aimez, pour que je puisse m'acheter une carapace de tortue géante qui me servira de maison appartement vue sur où je veux, quand je veux.
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